« Acheddeur – Concept hybride et puissant »
Décembre 2020
LE TERME ACHEDDEUR « UN BON ACHETEUR EST AVANT TOUT UN BON VENDEUR » ONT L’HABITUDE DE REPETER INLASSABLEMENT LES PATRONS ACHATS. MAIS ALORS, L’ACHETEUR DOIT-IL SYSTEMATIQUEMENT SE TRANSFORMER DANS SON OPPOSE POUR BIEN TRAVAILLER ? LE NOUVEAU PROFIL IDEAL DE L’ACHETEUR EST-IL « DOCTEUR JEKYLL ET MISTER HYDE » ? TENTONS DE REPONDRE A CETTE QUESTION.
C’est un peu l’histoire de l’iceberg et de sa partie immergée. En théorie, le travail de l’acheteur est d’être un apporteur de valeur et de ressources externes. Certains diront que c’est de créer et de gérer le panel de ses fournisseurs, de comprendre et connaître les marchés et d’anticiper les évolutions techniques et technologiques. D’autres ajouteront qu’il doit maîtriser les leviers stratégiques de compétitivité, faire progresser ses fournisseurs et manager au quotidien les performances de qualité, coût et délais de ses fournisseurs. Outre sa vision stratégique, l’acheteur est censé être un homme (et souvent une femme) qui sait dire « non » avec force. Son tempérament bien trempé lui permettrait de résister aux fournisseurs, et de défendre la citadelle de son entreprise.
L’ACHETEUR-VENDEUR À L’ANCIENNE DEVIENT « ACHEDDEUR »
Une fois que l’on a évoqué ce rôle théorique, force est de constater que la plus grosse difficulté reste l’acceptation des achats au sein de leur propre entreprise. Et le rôle n’est plus le même : être intégré dans les projets, avoir la maîtrise des dépenses de toute l’entreprise et travailler en binôme acheteur-prescripteur.
C’est aussi de faire passer en douceur les changements de fournisseur et de s’accorder avec la « technique » sur un cahier des charges fonctionnel, etc. Le rôle de vendeur de notre acheteur ne s’arrête pas à l’interne. Il a un vrai rôle de vente des besoins de son entreprise aux fournisseurs. Devenir le client préféré de ses fournisseurs révèle des meilleures stratégies de séduction. Tout un art. Mais le comportement de « l’acheteur-vendeur » est bien différent de son rôle initial.
Nous appellerons donc « l’acheteur-vendeur » du nouveau nom « d’acheddeur ». Savoir créer l’adhésion demande du temps, de la patience et de l’empathie. L’acheteur « vieille école » veut une réponse tout de suite de son fournisseur. L’acheddeur prend le temps d’amadouer son prescripteur pour mieux devenir incontournable.
C’est un peu la différence entre le boxeur et le joueur d’échecs. Non pas que la boxe soit dénuée de stratégie, mais les fi.celles ne sont pas les mêmes. L’acheddeur doit être plus souple avec ses frustrations.
L’acheteur classique se complaît à ne jamais perdre la face devant ses fournisseurs, le client est toujours roi. L’acheddeur doit être capable de courber l’échine, et dire oui sans conviction pour mieux revenir par la suite. Comme un commercial acharné.
SAVOIR JOUER DU CHAUD ET DU FROID AU QUOTIDIEN
Reste que tous les acheteurs ne sont pas capables d’être vendeurs. Certains patrons achats l’ont bien compris. Traditionnellement, la distribution des familles d’achat aux acheteurs se faisait par segmentation technique.
Les patrons achats les plus évolués commencent à les distribuer suivant le style d’acheteur nécessaire sur une famille. Par exemple, sur un marché de matières premières en pleine pénurie, un acheddeur performera mieux qu’un acheteur classique.
On lui affectera donc cette famille d’achats plutôt que celle où les produits sont standards et la compétition fournisseur féroce.
Oui, l’acheteur à l’ancienne est voué à évoluer. Non pas qu’il doive obligatoirement se transformer en chanteur de charme, en docteurs ès humanités ou en ami automatique et éphémère qui n’aime son interlocuteur que le temps d’une vente.
Mais savoir jouer du chaud et du froid doit devenir son quotidien. Et la schizophrénie guettera certains. C’est toujours mieux que le syndrome de Stockholm !
Source : Décision Achats, N°221